B comme beauté...
Pourtant il nous reste encore à célébrer
comme tu le fais
Célébrer ce qui, jailli d'entre nous,
tend encore vers la vie ouverte
Ce qui, d'entre les chairs meurtries, crie mémoire
Ce qui, d'entre les sangs versés, crie justice
Seule voie en vérité où nous pourrions encore
honorer les souffrants et les morts
Chacun de nous est finitude
L'infini est ce qui naît d'entre nous
fait d'inattendus et d'inespérés
Célébrer au-delà du désir, l'au-delà de soi
Seule voie en vérité où nous pourrions encore
tenir l'initiale promesse
Célébrer le fruit, plus que le fruit même
mais la saveur infinie
Célébrer le mot, plus que le mot même
mais l'infinie résonance
Célébrer l'aube des noms réinventés
Célébrer le soir des regards croisés
Célébrer la nuit au visage émacié
Des mourants qui n'espèrent plus rien
mais qui attendent tout de nous
Et nous l'à-jamais-perdu
Que nous tenterons de retourner en offrande
Seule voie où la vie s'offrira sans fin
paumes ouvertes
François Cheng, in Cinq méditations sur la mort - autrement dit la vie
Toussaint - Temps où les arbres s'éteignent, où les lampes s'allument pour veiller au chevet du jour qui baisse, lentement. Dans les jardins désœuvrés qu'envahit l'ivraie des brumes, les roses restent en enfance, faute de soleil épanoui auquel répondre face à face. Et Dieu même, oui, Dieu a serré les Siens dans Son orangerie.
François Cassingena-Trévedy, in Etincelles
En automne je récoltais
toutes mes peines
et les enterrais dans mon jardin.
Lorsqu'avril refleurit
et que la terre et le printemps
célébrèrent leurs noces
mon jardin fut jonché
de fleurs splendides et exceptionnelles,
Mes voisins vinrent les admirer
et chacun me dit :
"Quand reviendra l'automne,
la saison des semailles,
nous donneras-tu des graines de ces fleurs
afin que nous puissions les planter
dans nos jardins ?"
Khalil Gibran
(...)
La paix qui émane du paysage te touche à ce point parce qu'elle éveille en toi un lieu similaire, un lieu qui l'accueille et la comprend, un lieu qui lui répond. Sa douceur, son harmonie secrète, sa grâce singulière, ne font que susciter d'intimes correspondances. Si tu parviens à rejoindre ce lieu profond, à en situer le chemin - ce lieu caché, ce lieu qui n'en est plus un, qui donne forme plus qu'il ne contient - où que tu ailles, quoi qu'il arrive, toujours cette paix sera là. Par quel miracle, par quelle mystérieuse alchimie, demandes-tu ? Regarde, regarde encore, contemple la paix en sa beauté, jusqu'à ce qu'elle se dessine en toi, s'y imprime, jusqu'à ce que tu comprennes qu'elle est la forme même de ton âme.
(...)
Philippe Mac Leod, in Sens et beauté